mercredi 8 février 2012

Princesse décapitée, nems et condition féminine...

Week-end productif s'il en fut! Il y a déjà quelques temps, on a pris nos habitudes dans un petit café très sympa juste à côté de chez nous et sympathisé avec une des filles qui y travaille, Huong. Elle nous a proposé la semaine dernière de nous emmener visite Co Loa, juste à côté de là où habitent ses parents, à 30km d'Hanoi. Ce qui fut dit fut fait ce samedi, on a passé une journée formidable!

On s'est retrouvé vers 10h au café avec Huong et 3 de ses amies, et on est partis pour notre petit périple.  Ca m'a permis par ailleurs de voir enfin le fleuve rouge qui traverse Hanoï, et que je n'avais pas encore eu la possibilité de traverser ni même d'apercevoir. C'est assez étrange parce qu'on passe sans transition de la route périphérique et de l'encombrement urbain à une berge très verdoyante. Comem vous pourrez le constater sur la photo, c'était une fois de plus... brumeux. (Je commence à fantasmer sur des rayons UV, on a pas vu un gramme de soleil depuis un mois, ça devient un peur dur tout ce gris.)


45 minutes de route, une fois sortis de la banlieue d'Hanoi, on était dans la campagne et ça fait du bien de respirer un peu d'air frais avec de la verdure autour, en comparaison de l'air pollué par les milliers de scooter en ville.

On est arrivé à Co Loa, où les filles nous ont fait visiter le temple du Roi. Il y a toute un tas de légendes autour de la ville, qui fut pendant un moment la capitale du royaume Âu Lạc et en conserve les restes d'une forteresse (on n'a pas eu le temps de la voir mais ce sera pour la prochaine fois). Ce qui était super, c'est qu'on avait nos guides personnels, qui nous ont raconté toutes les histoires, que je mets ici :

Avec l'aide du génie Kim Quy (Tortue d'Or), le roi An Duong Vuong réussit à construire la citadelle de Cô Loa aux murailles aussi épaisses que hautes. Avant de le quitter, le génie lui donna une de ses griffes en disant :
- Mettez-la en guise de gâchette sur une arbalète et vous serez invincible.
À cette époque. Triêu Dà (Chao To), chef des tribus au Sud de la Chine, s'était déjà plusieurs fois livré à des incursions dans le royaume d'An Duong Vuong. Mais l'arbalète magique l'avait aussitôt découragé. Il usa alors de la ruse. Il envoya son fils Trong Thuy porter au souverain des Viêt des offres de paix, avec l'intention secrète de détruire la fameuse arbalète.
Le jeune prince eut l'occasion de faire la connaissance de la fille d'An Duong Vuong, la belle My Châu dont il tomba amoureux. Ils reçurent la permission de se marier. Trong Thuy finit par obtenir de sa femme le secret de la gâchette magique. Il en fit fabriquer une absolument identique pour la substituer subrepticement à la vraie. Il trouva ensuite un prétexte pour rejoindre son père en Chine. Au moment de leur séparation, My Châu lui montra une robe de plumes d'oie et lui dit :
- Si des troubles éclataient par hasard ici pendant ton absence, je sèmerai ces plumes sur mon chemin et tu sauras où me retrouver. 
Trong Thuy partit. Peu après, son père Triêu Dà prit la citadelle de Cô Loa. An Duong Vuong n'eut que le temps de sauter sur son cheval avec sa fille en croupe et de s'enfuir par une porte dérobée. Talonné par l'adversaire, arrivé au bord de la mer, il appela la Tortue d'Or à son secours. Celle-ci apparut et lui dit :
- Roi, l'ennemi est en croupe derrière toi !
An Duong Vuong comprit alors. Fou de douleur, il prit son épée, tua My Châu et se précipita dans la mer. Guidé par les plumes d'oie, Trong Thuy trouva le corps de sa femme décapité. Il l'inhuma dans la citadelle et se jeta dans un puits. Aujourd'hui encore, au village de Cô Loa, devant le temple du roi An Duong Vuong existe le "puits de Trong Thuy". Selon la légende, le sang de My Châu coula jusqu'à la mer et les huîtres qui le burent devinrent des huîtres perlières. Il paraît que si on lave une de ces perles avec l'eau du puits, elle prend un orient incomparable, ce qui prouve l'innocence de la princesse.

Au temple, on trouve en effet l'autel du roi, le puit, et la statue de la princesse décapitée... C'est assez étrange comme endroit, fréquenté par tous les gens du coin qui veillent sur le temple, et prient le roi, la princesse pour apporter bonheur et longévité sur le village.

Les armes du roi, à côté de l'autel qui lui est consacré. Tous les ans a lieu une grande cérémonie, où on ressort le palanquin, les armes, les bannières, et une grande procession est organisée dans le village, avec un tas de jeux à l'ancienne et de costumes d'époque.

La princesse My Chau, sans sa tête, donc.





Après cette partie culturelle, hop, en voiture Simone, on est partis à 3km dans le village de Huong pour manger. Et pas seulement manger, pour participer à la préparation du repas! On a attrapé les ingrédients sur le chemin, et arrivés en cuisine, au travail les touristes!

"C'est moi qui l'ai faiiiiiiiiit!"
"Manon tu laisses le gateau du Têt frit tout de suite!"

Donc maintenant, je sais fabriquer des nems moi-même, que demande le peuple? Du coup on s'est empiffré de nos productions, c'était vraiment bon et je pense qu'on en refera à la maison, on a bien noté tous les ingrédients et comment on procédait. Si vous êtes très sages, je vous en ferai en rentrant à Paris ^^


Xavier est très déçu d'apprendre qu'il ne pourra pas manger TOUS les nems qu'on a confectionnés... 
Chez les parents de Huong, un intérieur typiquement vietnamien : gros meuble en bois laqué avec des incrustations de nacre, portrait d'Ho Chi Minh au mur, et le scooter dans le couloir ^^


Après le repas, on a eu une grande discussion sur la condition des femmes au Vietnam (ne me demandez pas comment on en est passé des nems au féminisme...).
Le côté positif ici, c'est par exemple que l'école étant obligatoire sous le régime communiste, les femmes ont pu s'alphabétiser beaucoup mieux et vite que dans d'autres pays d'Asie. En revanche, il y a toujours un poids de la société traditionnelle et une façon de voir les choses qui n'a pas beaucoup changé dans la génération précédent la nôtre. Ca commence à bouger un peu chez les jeunes, mais ça n'a pas l'air simple.
Huong a 28 ans, pile mon âge, que moi je trouve évidemment jeune! Ici pas trop : elle a 28 ans et elle n'est toujours pas mariée, elle commence vraiment à se faire un peu vieille pour ça. Ca angoisse un peu ses parents, si bien que son père a expédié sa mère pour lui en parler parce que ça va pas pouvoir continuer comme ça bien longtemps... Et encore, eux restent assez discrets.
Une autre des Vietnamiennes nous disaient que ses parents lui collent une pression d'enfer pour qu'elle se trouve un mari, parce que faire un master d'économie en Australie, c'est bien joli, mais c'est pas ça qui va te donner un bon mari, ma fille, à 25 ans, je vous le demande, à quoi ça ressemble de ne pas être mariée à cet âge? Tiens je te présente untel, va le voir, tu me dis si tu veux te marier avec lui ou pas, hein, décide-toi vite, parce qu'à ton âge tu ne peux pas te permettre de faire la fine bouche...
On sent qu'elles font ce qu'elles peuvent pour résister à la pression collective, mais que ça n'est pas facile tous les jours. Tout ça nous paraît évidemment assez ahurissant, de notre point de vue d'occidentales bien émancipées.
Elles sont d'autant moins enclines à se laisser forcer la main qu'ici on ne divorce pas, ou très peu, et que c'est très mal vu. En plus, c'est forcément la faute de l'épouse si le couple n'a pas marché, et c'est elle qui sera montrée du doigt par toute la communauté. De même, si un enfant est mal élevé, c'est la faute de sa mère, et uniquement de sa mère, et le père ne sera jamais mis en cause.
Bref, les filles ne nous ont pas conseillé de nous trouver un mari vietnamien, on y perdrait sacrement au change par rapport aux Occidentaux...

Pour finir sur une note plus guillerette, à force de galérer avec les prénoms des uns et des autres, on a rebaptisé tout le monde. Nos petites Vietnamiennes s'appellent maintenant Alice, Julie et Nathalie, quant à nous on a reçus des prénoms vietnamiens signifiant "héros, "homme fort", "fleur qui sent bon". Pour ma part je m'appelle Hông, "rose", un prénom très populaire et qui parait-il me va comme un gant...


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